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Santé Mentale et psychiatrie: dernières mesures

Le ministère, la psychanalyse et la psychiatrie

Communiqué par l' Agence Lacanienne de Presse, voici le texte intégral du discours introductif de Philippe Douste-Blazy de sa conférence de presse de ce matin, (vendredi 4 février 2005), les réactions et commentaires de Jacques-Alain Miller à ce discours (d'un point de vue psychanalytique), ainsi que celle de la SARP - (Société pour l’action et la recherche en psychiatrie), organisation de psychiatres née dans la contestation de l’amendement Accoyer

 



Paris, le vendredi 4 février 2005 Site : Flash 12 h30

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Paris, le 4 février (ALP) —

 

Messieurs les Présidents,

 

Mesdames et Messieurs,

 

Je voulais m’adresser par ces quelques réflexions aux malades et aux professionnels.

 

Aux malades d’abord, parce que le propre de la santé mentale est qu'elle doit faire face à la souffrance née du plus intime. Face à cette souffrance secrète, indicible, le premier devoir d'une société fondée sur les solidarités et les libertés est de reconnaître qu'il ne saurait y avoir un seul type de réponse. La souffrance psychique n'est ni évaluable, ni mesurable.

 

La maladie psychique retentit sur la personne comme individu, mais aussi comme être social, parce qu’elle altère le rapport à l'autre, base du lien social.

 

Je voulais aussi m’adresser aux professionnels du secteur psychiatrique, médicaux et non médicaux. Exemplaires, motivés, compétents, dévoués, travaillant souvent dans des conditions difficiles, épuisés à force de tenter de maintenir à flots un navire à qui on a n’a pas donné tous les moyens. Vous le savez, la psychiatrie ne va pas bien et tout particulièrement l’hôpital public. Malheureusement, ces rapports successifs, à la mesure du silence qui entoure un sujet encore porteur de  tabous. Il y a eu beaucoup de rapports. Ils ont montré la multitude des approches des uns et des autres. Ils ne se sont pas traduits en actions visibles sur le terrain.

 

J’ai voulu, dès mon arrivée dans ce ministère, me rendre compte, de ce qu’il en était réellement. J’ai découvert des hôpitaux psychiatriques en souffrance faute de moyens adaptés.

 

Face à la maladie mentale, la société se tait à la mesure du silence qui entoure un système encore porteur de tabou. C’est le délicat problème de l’enfermement de celui qui est différent, déjà soulevé avec justesse par Michel Foucauld. Ma volonté est aujourd’hui d’apporter une réponse construite avec l’ensemble des acteurs, non seulement pour la santé publique, mais aussi pour notre société.

 

Pour mieux répondre aux besoins des patients souffrant de maladie mentale, il est nécessaire de les écouter, de leur parler et d’établir l’indispensable communication entre eux et le monde extérieur. Ce sont ces gestes invisibles qui permettent de redonner aux patients toute leur dignité et leur place, non seulement comme malade à part entière, mais aussi comme citoyen.

 

Aujourd'hui, la psychiatrie se trouve confrontée à une situation paradoxale et complexe.

 

Les comparaisons européennes de santé mentale montrent que la place de la France n'est pas à la hauteur de son ambition. La France a le taux de suicide le plus élevé pour les personnes âgées, le deuxième pour les adolescents, alors que la consommation des psychotropes est parmi les plus importantes.

 

Le recours à la psychothérapie y est parmi le plus faible d'Europe. Plus de 80 % des patients souffrant de troubles mentaux sont pris en charge par des médecins généralistes, le recours à une consultation spécialisée auprès d'un psychiatre demeure difficile.

 

Paradoxalement, la France possède le plus grand nombre de psychiatres par habitant après la Suisse. C’est la spécialité qui compte le plus de praticiens, puisque 13 000 psychiatres sont actuellement en exercice.

 

Les capacités d'hospitalisation en psychiatrie, mesurées en nombre de lits par habitant, placent la France en troisième position en Europe.

 

Mais aujourd’hui nous avons un double constat à faire :

 

1/ La réponse publique n’est pas adaptée.

 

2/ L’offre des soins psychiatriques est inégale sur l'ensemble du territoire et souffre de cloisonnement.

 

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J’ai souhaité vous réunir ce matin pour vous présenter les grandes orientations du document de travail Psychiatrie et Santé Mentale, document élaboré à l’issu d’une phase d’écoute des 30 acteurs que nous avons reçus, document écrit que je viens d’envoyer ce matin pour concertation à tous ces acteurs avant de les recevoir à nouveau et d’aboutir à un programme d’actions.

 

Quatre priorités et 2 programmes spécifiques : priorités correspondant aux quatre préoccupations les plus exprimées lors de la phase d'écoute:

 

Nous devons tout d’abord investir dans l’hôpital public psychiatrique

 

1.     Premier axe : réinvestir dans les murs de l’hôpital psychiatrique.

 

Je voudrais ici faire une remarque. Il y a quelques années, il a été défendu l’idée qu’il y avait trop d’hôpitaux, qu’il fallait fermé de nombreux lits (50% en 10 ans !).

 

L’environnement des patients et les conditions de travail se sont alors dégradées.

 

Il faut arrêter cela et au  contraire, renforcer l’hospitalisation complète et confirmer le moratoire sur la fermeture de lits en psychiatrie.

 

Aujourd’hui, j’estime le besoin en investissements des services de psychiatrie, qu’ils soient en hôpitaux spécialisés, en centres hospitaliers, ou en centres hospitaliers universitaires, à 2 milliards d’euros. Certes, 300 millions d’euros d’aides vont, dans le cadre d’« hôpital 2007 », permettre de réaliser 600 millions d’investissements, mais c’est très insuffisant.

 

Je veux rompre le cercle vicieux du désinvestissement chronique.

 

Je veux répondre à l’appel des patients et des professionnels.

 

J’ai donc décidé de lancer un programme massif d’investissements pour la psychiatrie. Un programme sur 6 ans, de 2005 à 2010. Je vais ainsi tripler les aides d’ « hôpital 2007 » qui y sont consacrées : 750 millions d’euros d’aides seront dégagées afin de générer plus d’1,5 milliard d’euros d’investissements supplémentaires.

 

C’est ambitieux. C’est surtout nécessaire pour la reconstruction, la rénovation, l’humanisation (Il existe, dans notre pays, des cellules d’isolement indignes. Nous ne pouvons le tolérer).

 

et surtout, bien sûr, la sécurisation (liaisons directes entre les services d’urgence et le commissariat ou la gendarmerie, dispositifs individuels de téléalarmes, sécurité des bâtiments, personnels de sécurité...)

 

Le secteur de la psychiatrie doit disposer d’un bien meilleur niveau d’accueil, de confort et de sécurité. C’est un signe fort qui redonnera – je l’espère – confiance à la population, aux patients et aux professionnels, et suscitera de nouvelles vocations.

 

Bien sûr, cet investissement doit bénéficier non seulement à la modernisation des locaux, mais aussi à l’organisation des soins.

 

Il faut donner un nouvel élan au « secteur psychiatrique », et le conforter comme base de l’organisation des soins. Mais, il faut aussi rapprocher l’offre hospitalière de la population qu’elle dessert, en la rapprochant des centres villes. Les différents acteurs de la santé mentale doivent mieux travailler ensemble : le secteur, les psychiatres libéraux, les établissements privés, les médecins généralistes. Tout en réaffirmant la vocation et la légitimité du « secteur », les réseaux de santé doivent se développer.  

 

A ce titre, je voudrais expérimenter dans quelques régions la présence d’un psychiatre, par exemple au centre 15, dans le cadre du principe de la psychiatrie de liaisons pour assurer une permanence de réponses, de conseils et d’orientation destinés aux professionnels. Un centre d’appel réservé aux professionnels.

 

2.     Deuxième axe : Les murs ne sont rien sans les Hommes, vous le savez, il faut donc augmenter les moyens humains.

 

·      En renforçant l’hospitalisation complète, je confirme donc le moratoire – que j’ai déjà annoncé – sur les fermetures de lits et de places et désire aussi conforter l’offre psychiatrique des services d’urgences en centres hospitaliers et CHU.

 

·     Pour les praticiens hospitaliers, je ne doute pas que les négociations statutaires en cours permettent de rendre les postes de psychiatres plus attractifs, et d’entamer un rééquilibrage géographique, en rémunérant mieux, par exemple, les praticiens hospitaliers dans les zones déficitaires en psychiatres.

 

·     Par ailleurs, j’ai décidé d’augmenter le nombre d’internes en psychiatrie de 245 à 300 par an.

 

·      En développant les alternatives à l’hospitalisation, les soins ambulatoires, comme l’hôpital de jour, de semaine ou de nuit, et les centres médico-psychologiques

 

J’entends dégager d’ici 2008 près de 140 M€ afin de créer   2 500 postes médicaux et non-médicaux.

 

C’est un changement total de politique, puisque les moyens attribués à la psychiatrie n'ont cessé de décroître depuis 10 ans. La réorganisation de la psychiatrie vers plus de modernité doit se poursuivre, en s’appuyant sur plus de moyens.

 

 

3.     Le troisième axe est la nécessaire amélioration de la formation des infirmiers et des infirmières à la psychiatrie ;

En application d’une directive européenne, en 1994, la formation spécifique des infirmières/infirmiers en psychiatrie a disparue. Nous ne pouvons revenir dessus. Et le départ à la retraite de professionnels confirmés brisent la transmission d’un savoir, fait de vécus, précieux dans le domaine de la psychiatrie.

 

Pour tous ceux qui prennent un nouveau poste en psychiatrie, j’entends mettre en place un double dispositif d’accompagnement durant la première année d’exercice. Ce dispositif comporterait :

 

·      une formation d’adaptation à l’emploi, en accord avec les syndicats, dès 2005, qui serait une mise en situation professionnelle, à l’extérieur de leur propre service. Cette formation serait composée de 5 périodes de 3 jours pendant lesquelles seront analysées les situations rencontrées par les infirmiers.

 

·      Ensuite, je souhaiterais généraliser un dispositif innovant de compagnonnage/tutorat.  Je pense nécessaire que tous les infirmiers ou infirmières qui décident de venir travailler en psychiatrie - et ils étaient plus de 5 000 l’an dernier - soient pris en charge par un tuteur, un compagnon, tout au long de leur première année. Le tuteur serait une infirmière ou infirmier en psychiatrie qui auraient choisi d’être formateur. Il n’aurait pas de relation hiérarchique. Ce serait un infirmier expérimenté qui prendrait le tiers de son temps pour accompagner 4 nouveaux collègues, en les suivant chacun en moyenne 3 heures par semaine, toute l’année.

 

Ces mesures sont certes très coûteuses, mais elles sont nécessaires. Je suis prêt à y consacrer près de 25 M€ par an.

 

Par ailleurs, je rappellerai avec fermeté aux instituts de formation l’obligation d’un strict respect des programmes et du nombre d’heures consacré à la psychiatrie.

 

 

4.     Enfin, et c’est un point particulièrement souhaité par les patients et leurs familles, il convient de développer l’offre sociale et médico-sociale, avec volontarisme.

 

C’est un début de réponse aux 10 000 patients hospitalisés qui pourraient être mieux pris en charge médicalement en soins externes, s’il leur était possible de bénéficier d’un accompagnement ou d’un hébergement adapté. C’est aussi une réponse à tous ceux qui, sans être hospitalisés, ne trouvent pas de prise en charge adaptée.

 

Avec Marie-Anne MONTCHAMP qui précisera dès aujourd’hui ce dispositif, je souhaite donc agir selon 3 axes, entre 2005 et 2007 :

 

·      créer 1 900 places dans les services d’accompagnement à domicile ;

 

·      flécher, pour la santé mentale, 1 000 places d’hébergement en établissements médico-sociaux ;

 

·      enfin, répondant à une forte attente, créer 300 lieux d’entre aide, appelés par les associations « clubs ». Certains existent déjà à titre expérimental. Il s’agit de groupes d’entraide mutuelle, permettant en accueil de jour, de tisser ou de maintenir un lien social par l’intermédiaire de rencontres et d’activités culturelles, de loisirs ou sportives.

 

Ce renforcement global de l’offre sociale et médico-sociale en santé mentale, représente un effort considérable de 86 millions d’euros sur 3 ans ; soit 38 M€ pour l’hébergement, 20 M€ pour les lieux d’entre aide, financés dès 2005 par la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie, enfin 28 M€ pour les services d’accompagnement.

 

J’ajoute, à ces quatre priorités, 2 programmes spécifiques.

 

1.     L’un concerne les détenus :

 

La réforme de 1994 de la médecine pénitentiaire, que nous avions mise en place avec Simone Veil, a commencé à porter ses fruits pour les maladies somatiques. Des unités spécialisées les UHSI (Unités hospitalières sécurisées interrégionales) sont en train de s’ouvrir dans les hôpitaux pour accueillir les détenus dans des conditions optimales, à la fois sur le plan de la sécurité et des soins, dans chaque région pénitentiaire.

 

Mais le nombre de personnes incarcérées atteintes de troubles psychotiques a quintuplé ces dix dernières années. Il est passé de 5 % à 25 % aujourd’hui. Nous devons donc construire des unités spécialisées pour les détenus atteints de troubles psychiques nécessitant une hospitalisation.

 

A terme, 19 unités appelés UHSA (Unités hospitalières spécialement aménagées) répondront à ces besoins. J’engage dès à présent, avec le ministère de la Justice, l’élaboration du cahier des charges et un programme des 5 unités les plus importantes, qui devront être opérationnelles en 2008, et couvrir 60 % de la population carcérale.

 

2.     Le deuxième programme concerne l’amélioration de la prise en charge de la dépression et la lutte contre le suicide

 

   Nombre de personnes prenant un traitement antidépresseur n’en ont probablement pas besoin. A contrario, moins de la moitié des personnes souffrant de troubles dépressifs graves sont pris en charge. En effet, on confond souvent la souffrance liée à un évènement difficile de la vie, comme la perte d’emploi ou le dépit amoureux, la déprime et la dépression, la « vraie ». Les professionnels ont aussi des difficultés à adapter leur traitement face à la demande du patient. Je retiens donc deux actions à mener simultanément :

 

·     réaliser une campagne média grand public, par l’INPES (Institut de prévention et d’éducation à la santé), pour expliquer aux Français la différence qui existe entre « la déprime » et la dépression et en soulignant que les antidépresseurs ne sont pas forcément une bonne réponse à la tristesse.

 

·     aider les professionnels de santé en leur diffusant des guides au repérage des troubles dépressifs et des recommandations de conduite à tenir. La Haute Autorité en Santé élaborera ces recommandations, et je veillerai à ce que l’ensemble des sensibilités de la psychiatrie française, dont la psychanalyse, soient associés à leur élaboration.

 

   Pour lutter contre le suicide, à la fois fléau individuel et enjeu de santé public, les réponses ne sont pas simples, mais nous devons poursuivre les efforts entrepris, et les accentuer.

 

Une stratégie nationale d’actions face au suicide a été mise en œuvre sur 2000-2005. Nous réalisons son évaluation cette année, et envisagerons alors les poursuites ou les inflexions nécessaires. Néanmoins, je souhaite dès à présent accentuer nos efforts à destination des jeunes.

 

    Il s’agit essentiellement de repérer la dépression dans les établissements scolaires. Cette action sera conduite, en lien avec l’Education Nationale, dans le cadre du Partenariat en Santé Publique développé entre nos deux Ministères.

 

Les enseignants seront sensibilisés au repérage des modifications comportementales des enfants dans le cadre scolaire.

 

La santé scolaire jouera donc un rôle clé dans ce dispositif. Les infirmières en particulier, seront formées à l’écoute des jeunes, pour lesquels elles constituent déjà des référents naturels - notamment pour l’accès à la pilule du lendemain pour les filles.

 

-       Concernant la prise en charge des enfants et des adolescents, je souhaite rattraper le retard constaté  en pédo-psychiatrie, en créant des lits dans les départements qui en sont dépourvus. Dix départements ne disposent pas aujourd’hui d’hospitalisation complète en psychiatrie infanto-juvénile. 11 M€ y seront consacrés et feront l’objet d’une évaluation précise de leur utilisation. Nous avons également une réflexion à mener sur la formation de nouveaux pédopsychiatres, trop peu nombreux aujourd’hui.

 

-       Enfin, je souhaite poursuivre la mise en place des Maisons des Adolescents comme la Maison de Solenne à Cochin, dans le cadre d’un partenariat entre mon ministère et la Fondation Hôpitaux de Paris/ Hôpitaux de France selon le principe proposé par Madame Bernadette Chirac.

 

-       Concernant le bon usage des antidépresseurs en particulier.

 

·     J’ai demandé à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) les possibilités de restreindre la prescription et l’usage des antidépresseurs chez l’enfant et l’adolescent. Les experts doivent se réunir le 8 mars. Je prendrai immédiatement les mesures qu’ils préconiseront. Je rappelle qu’aujourd’hui ces traitements n’ont pas d’indication dans le traitement de troubles dépressifs chez les enfants et les adolescents.

 

·     En parallèle, d’ici la fin du mois de mars, l’AFSSAPS diffusera une recommandation sur le bon usage des antidépresseurs chez l’adulte.

 

 

 

Enfin, s’ajouteront bien sûr des mesures transversales importantes pour les patients et pour les praticiens hospitaliers, et une démarche résolue de promotion de la santé mentale pour le grand public.

 

Pour les patients, il s’agit de renforcer les droits des malades et de leurs proches.

 

-       en veillant à leur pleine participation dans l’élaboration des schémas d’organisation sanitaire ;

 

-      en portant le niveau global des subventions aux associations d’usagers et de familles à 600 000€ ;

 

-       en ne limitant plus les compétences des commissions départementales des hospitalisations psychiatriques aux seules hospitalisations sans consentement, mais également à certaines pratiques réalisées en hospitalisation libre, comme la mise en chambre d’isolement, la contention ou l’hospitalisation en services fermés.

 

Enfin, l’image de la santé mentale doit être aussi améliorée par la diffusion d’informations régulières sur la psychiatrie et la santé mentale, en dehors de toute crise ou drame. Toutes les actions de promotion de la santé mentale doivent être encouragées et soutenues

 

Au total, ce plan pourrait ainsi bénéficier :

 

·     en investissements, de 750 millions d’€ d’aides entre 2006 et 2010 ;

·     en fonctionnement de 280 millions d’€ de 2005 à 2008.

 

C’est donc plus d’un milliard d’€ qui seront consacré à ce plan, un effort considérable de la collectivité à la hauteur des enjeux de la santé mentale.

 

Vous le voyez, tant par la méthode, par les moyens dégagés que par ses objectifs, ce n’est pas un simple plan que je désire construire mais une véritable politique de santé mentale.

 

Je vous remercie.

 

 

 

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Ci-dessous, en provenance de la même source, les réactions et commentaires de Jacques Alain Miller à ce discours. Et plus bas encore, celles enthousiastes de la SARP -

 

 

 



AGENCE LACANIENNE DE PRESSE

Nouvelle série, n° 8 — Paris, le vendredi 4 février 2005

Site :

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- JAM (SUITE)

- UN TOURNANT HISTORIQUE

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JAM (SUITE)

Paris, le 4 février (ALP) — Au retour de la conférence de presse du ministre de la Santé, J.A. Miller a poursuivi avec nous l’entretien commencé le 14 janvier dernier.

 

-      Alors, vous êtes content du ministre ?

-      J’aurais vraiment mauvaise grâce à ne pas l’être.

-      Oui ?

-      Pour la première fois, un ministre s’engage à ce que la Haute Autorité en Santé prenne en compte dans l’élaboration de ses recommandations en santé mentale les indications de psychanalystes, il arrête le démantèlement du Secteur psychiatrique voulu par le Plan Cléry-Melin, et s’engage au contraire à le développer, il rend hommage aux psychanalystes, aux psychothérapeutes relationnels, et à tous les psys. Nous revenons de loin.

-      Vous avez entendu ce que vous vouliez entendre ?

-      Et je n’ai pas entendu ce que je ne voulais pas entendre : rien sur la loi Accoyer et ses décrets d’application. La loi est la loi, certes, mais elle reste en suspens.

-      Un autre ministre pourrait vouloir l’appliquer ?

-      Sans doute, mais à ses risques et périls, le texte législatif étant contradictoire. Le silence du ministre vaut un long discours. La loi que nous avons combattue est mise en sommeil, et ce ministre ne sera pas le Prince charmant de cette belle, ou plutôt de ce monstre.

-      Les psychiatres seront-ils contents ?

-      Ce sera à eux de le dire.

-      Et les psychothérapeutes ?

-      Je ne peux parler pour eux, et ils sont très différents les uns des autres. Phil est un dur, mais j’espère qu’il voudra bien admettre que le soleil brille quand le soleil brille, sans se faire trop de mouron pour demain, où il pourrait pleuvoir à nouveau. Inversement, Serge, Ginger de son nom, qui est, lui, un négociateur né, pourra tenir la dragée haute à ses interlocuteurs de la DGS. Enfin, Jean-Michel Fourcade verra confirmé l’optimisme tranquille dont il fait toujours preuve.

-      Et les psychologues ?

-      Ils s’exprimeront par leurs organisations.

-      Donc, le soleil brille ?

-      La vérité consiste à dire « la neige est blanche » quand la neige est blanche. C’est ce qu’explique à longueur de pages Hilary Putnam, qui fut le collègue de Quine à Harvard. C’est très difficile à démontrer, mais enfin, on y arrive. Eh bien, la vérité consiste aussi à dire que le soleil brille quand le soleil brille. Et il fait fondre la neige et la glace. Bref, c’est le printemps en hiver.

-      Et demain ?

-      Demain, le ministre sera au Forum des psys.

-      Il parlera ?

-      Comme prévu. Il sera là à 18h, il veut entendre l’intervention de BHL, et nous écouterons son discours à lui, qui sera le dernier.

-      Et…

-      À demain à la Mutualité, 14 heures.

 

 

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TOURNANT HISTORIQUE :

Paris, le 4 février (ALP) — La SARP (Société pour l’action et la recherche en psychiatrie), organisation de psychiatres née dans la contestation de l’amendement Accoyer, communique :

 

 

Tournant historique : un ministre pour la psychiatrie !

 

         Dernière minute : lors de sa conférence de presse, ce matin à dix heures au Ministère de la Santé,Philippe Douste-Blazy a présenté son Plan pour la psychiatrie et la santé mentale. Sur un ton d’une authenticité et d’une conviction rare, le ministre a produit l’événement. Alors que des informations erronées et alarmantes circulaient depuis hier (article dans Libération paru ce matin), il s’est en fait agit de bien autre chose.

         Avant de revenir sur les mesures, nombreuses et chiffrées, annoncées par le Ministre dans un discours de près de quarante minutes, il faut dire que nous avons été frappés par l’énonciation, le ton déjà évoqué ci-dessus, et les orientations fortes martelées par le Ministre, qui a ouvert son exposé par deux principes marquants :

         « - Il y a toujours plusieurs réponses appropriées. »

         « - La souffrance mentale n’est ni évaluable ni mesurable, à la différence des autres spécialités médicales »

         Puis le Ministre a fait état des contradictions qui fondent le problème de la psychiatrie en France, avec notamment un taux de suicide élevé contrastant avec une consommation record de psychotropes, un taux de recours à la psychothérapie le plus faible d’Europe, un nombre de psychiatres élevé, et un nombre de lits de psychiatrie parmi les plus grands en Europe.

        Plusieurs axes et mesures en découlent :

         1. En psychiatrie publique : une offre de soins inégale et cloisonnée. «Rompre avec le cercle vicieux du désinvestissement public ».

         - Rompre avec l’idée de fermeture des lits. Renforcer l’hospitalisation complète. Un programme d’ « investissements massifs sur six ans » est prévu pour les équipements de l’hôpital psychiatrique : tripler les aides prévues par le Plan 2007 : 7,5 Millions d’€ ouvrant à investissement de 1 Milliard d’€. Le Ministre a signalé notamment que « l’état des cellules d’isolement était indigne de la personne humaine ».

         - Conforter l’offre publique d’accueil d’urgence.

Au total les investissements dans la psychiatrie en CHS, CHG et CHU seront de 2 Milliards d’€.

         - Sécuriser l’hospitalisation par la téléalarme et les personnels.

        Le Ministre a dit espérer, par ces mesures notamment, que la psychiatrie pourra susciter de nouvelles vocations. Et s’il a évoqué la nécessaire amélioration  des collaborations entre les différents acteurs, le « réseau », il a réaffirmé vouloir donner « un nouvel élan au secteur psychiatrique, comme base de la psychiatrie » : « je redis mon attachement au secteur, je réaffirme la légitimité du secteur. »

        - Un essai de régulation psychiatrique au SAMU sera tenté.

         2. Les moyens humains : Le ministre a évoqué les négociations statutaires en cours et le rééquilibrage géographique que pourrait favoriser une meilleure rémunération dans les zones désertifiées. Il a annoncé vouloir former 300 internes par an au lieu des 245 actuels et inverser la baisse constante des moyens de la psychiatrie observée depuis 10 ans. Il assure qu’à l’instar de son Plan pour les Urgences, le contrôle de l’affectation effective des crédits pour la psychiatrie sera rigoureux.

         3. La formation des personnels infirmiers sera renforcée par des périodes d’adaptation à l’emploi (5 périodes de 3 jours), le compagnonnage et le tutorat (4 collègues suivis trois heures par semaine toute une année par un senior sur un tiers de son temps), le stricte respect des programmes et heures consacrées à la psychiatrie dans les Instituts de formation.

         4. Le développement de l’offre médico-sociale afin de désengorger l’hospitalisation temps plein (dans une proportion de 15 à 20%) : 1900 places en accompagnement à domicile, 1000 places fléchées en établissements médico-sociaux

         5. Prison : le Ministre a  déclaré vouloir « être au rendez-vous des Droits de l’Homme en prison » et a annoncé la création de 19 unités hospitalières spécialement aménagées, dont 5 avant 2008, répondant aux besoins de 60% de la population carcérale.

         6. Dépression et suicide : « Nombre de personnes prenant des antidépresseurs n’en n’ont pas besoin », même si, précise le Ministre, « près de 50% des personnes souffrant de dépression ne sont pas prises en charge ». « On confond tristesse et dépression » a-t-il affirmé avant d’annoncer une campagne d’information grand public par l’INPES sur ce thème. « Les antidépresseurs ne sont pas forcément une bonne réponse à la tristesse », a-t-il conclu avant d’annoncer vouloir confier à la Haute Autorité de Santé la mission d’aider à élaborer des recommandations nouvelles et de préciser : « Je veillerai à ce que l’ensemble des spécialités, dont la psychanalyse, soient associées à cette démarche. »

         7. En ce qui concerne la pédopsychiatrie, un programme de création de lits d’hospitalisation est annoncé ainsi que la formation de nouveaux pédopsychiatres, la continuation du programme des Maisons de l’adolescence sur le modèle de la Maison de Solène. Quant aux psychotropes, le Ministre demandera à l’AFSSAPS de bien dire les AMM. Il a dit préférer que les psychiatres seuls puissent les prescrire.

         Une question sur le drame de Pau a ensuite permis au Ministre de réaffirmer la nécessité du secret médical « en psychiatrie plus qu’ailleurs ». Puis une question a porté sur l’affirmation par le Ministre « d’une souffrance ni mesurable ni évaluable » : « Est-ce un changement dans une psychiatrie toujours plus cognitiviste ? Est-ce un nouveau lien entre psychiatrie et psychanalyse ? » A quoi le Ministre a répondu : « Vous avez bien entendu. La question que vous posez est considérable. La psychiatrie a fait d’énormes progrès, comme la cardiologie, mais penser… prôner des réponses uniques serait faux… l’évaluation du diamètre d’une artère est plus facile que la mesure de l’évolution d’une maladie psychiatrique. »

        La SARP se réjouit et se félicite de la concertation qui s’annonce !

 

 



Le discours du Ministre est accessible en ligne sur le site du gouvernement ainsi que les questions qui lui furent posées et les réponses qu'il y proposa. Notamment celle concernant la réglementation de la psychothérapies. Psychanalyse en mouvement les soumet ici à votre lecture...  



 "Questions / réponses
Concernant les patients potentiellement dangereux :
Le Garde des Sceaux et moi-même avons confié une mission à nos deux services d’inspection, l’IGAS et l’IGSJ, afin de mettre à plat le dispositif d’hospitalisation sans consentement (Hospitalisation d’Office et Hospitalisation à la Demande d’un Tiers). J’ai effectivement le sentiment que ce dispositif a vieilli, et qu’il n’est peut-être plus aussi efficace pour la protection des patients eux-mêmes et bien sûr de la société.
Dès que nous disposerons de leur rapport, nous prendrons les mesures qui s’imposent, en concertation avec les personnels. Les deux procédures pourraient être fusionnées pour plus d’efficacité, le Préfet pourrait jouer alors un rôle majeur dans la prise de décision. Mais c’est point particulièrement important et j’attends et ce rapport conjoint et la travail de la concertation pour engager cette réforme cruciale tant pour la protection des patients que pour la société.
Il serait sage de réfléchir à un élargissement de la notion d’injonction de soins à des patients, auteurs de délits graves, et pour lesquels un suivi psychiatrique s’impose en milieu ouvert, et comment s’en assurer. Je souhaite pouvoir travailler à cet effet avec le Garde des sceaux, Dominique Perben pour proposer rapidement les mesures nécessaires.
Concernant les auteurs d’agressions sexuelles :
J’entends assurer la bonne application de la loi de 1998, et, en particulier, garantir l’exécution de l’injonction de soins prononcé par le juge.
J’ai donc décidé la création une dizaine de centres ressources interrégionaux, qui auront une fonction de référence et de conseils pour les psychiatres chargés d’assurer le suivi des auteurs d’infraction sexuelle. 5 M€ y sont consacrés sur la durée du plan.
Enfin, je m'engage – et j’en fais une priorité absolue - à ce que les services déconcentrés mettent en place sans délai le dispositif départemental de suivi des personnes traitées dans le cadre d’une injonction de soins.
Faut –il faire rembourser à l’Assurance Maladie les actes des psychologues ?
C’est une réflexion que je veux pas exclure. Mais dans un premier temps, il convient grâce aux moyens nouveaux de ce plan de recruter de nombreux psychologues, par exemple dans les centres médico-psychologiques.
Amendement Accoyer :
L’article 52 de la loi du 9 août 2004 est issu d’une proposition parlementaire (amendement du député Bernard Accoyer). L’objectif du législateur est de protéger le public en précisant les conditions d’usage du titre de "psychothérapeute". En effet, actuellement en France, quiconque souhaite se prévaloir de ce titre peut s’installer librement, sans déclaration ni contrôle.
Un décret en Conseil d'Etat doit préciser les modalités d'application du présent article et en particulier les conditions de formation théoriques et pratiques en psychopathologie clinique qui devraient être remplies. Ce décret, qui s’inscrit clairement dans une démarche d’amélioration des pratiques professionnelles, est attendu par les associations familiales et de malades, souhaitant bénéficier d’une information claire sur l’offre de prise en charge en psychothérapie.
Cela explique que la concertation autour de ce décret, avec l’ensemble des partenaires concernés et avec l’Education Nationale, soit longue. Mais c’est une étape nécessaire pour atteindre à terme l’objectif recherché par la loi, d’une amélioration de la qualité de formation et de la transparence des professionnels pratiquant les psychothérapies."


 

 

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04/02/2005
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